samedi 8 novembre 2008

ARGENT ET SPIRITUALITE.


"Don't make it cheap !" [Ne le faites pas bon marché], disait Swami Prajnanpad à son disciple Arnaud Desjardins qu'il conseillait en vue de la transmission d'un enseignement spirituel au sein d'un ashram en France. Je remarque qu'Arnaud Desjardins ou Douglas Harding (et ses vrais amis) sont les rares sur le marché spirituel à proposer une démarche dont le coût n'est pas centré sur l'argent. Arnaud Desjardins fait travailler ceux qui viennent dans son ashram mais demande à chacun de donner financièrement ce qu'il lui semble juste de donner par rapport à ses possibilités et bien sûr par rapport à la valeur du lieu. Douglas Harding et maintenant ses vrais amis comme José Le Roy ne demandent que de l'attention à soi-même et parfois un partage des frais comme entre vrais amis.

Richard Moss pour 10 jours demande par exemple1000 euros pour son enseignement auxquels s'ajoutent le prix du logis et du couvert. Andrew Cohen demande 270 euros pour un week-end auxquels s'ajoutent là aussi le prix du logis et du couvert. Ghis autrefois nommée Ghislaine Lanctot, une enseignante spirituelle Québecquoise qui se réfère à Sri Aurobindo, Mère et Satprem demande 1000 euros en liquide pour 10 jours de son enseignement qui invite à se libérer de toute autorité autre que soi-même et qui propose pourtant des moyens alternatifs à l'argent.


Est-ce que quelqu'un qui est au SMIC (environ 8 euros nets de l'heure) et chargé de famille ou quelqu'un qui a un handicap sévère et touche environ 700 euros par mois peut envisager de s'engager dans ce genre de recherche spirituelle ? Et pourtant rien ne dit qu'un handicapé ou un smicard ne puisse pas participer à une évolution consciente de la conscience.

Je ne comprenais pas bien cela mais la vie m'a fait un drôle de tour alors que je m'étais engagé spirituellement auprès de l'un de ces maîtres en évolution consciente de la conscience, elle a fait fondre à tel point les ressources familiales que j'ai dû laisser tomber. Mais au fond, c'est la vie, le suprême gourou : j'ai réalisé que avant tout relié à la recherche de Sri Aurobindo, Mère et Satprem, il fallait que j'écoute la vie et son enseignement. Un collectif d'individus qui témoigne d'une certaine conscience collective manifeste ne vaudra jamais pour moi le gourou qu'est la vie. Si pour entrer dans un tel collectif je n'ai pas les moyens financiers alors cette manifestation de conscience collective me paraît en dessous de la conscience de la vie qui elle seule mène l'évolution consciente de la conscience.

Ce qui est très curieux est qu'une fois la leçon apprise, la vie m'a de façon inattendue redonner un revenu de classe moyenne correct.

Ceci dit certains qui ont les moyens financiers devront s'intéresser à ces maîtres spirituels pour atteindre ce point où ils seront capables de se mettre à l'écoute individuellement de leur gourou intérieur, la vie dans son mouvement d'évolution consciente de la conscience. Pour moi, ce fût le cas et puis quand la vie a estimé que je devais passer mon chemin et que j'ai persisté à ne pas l'entendre, elle a pris les grands moyens.

Sri Aurobindo et Mère comme la vie d'ailleurs n'hésitaient pas à envoyer leurs disciples vers des maîtres spirituels qui interrogés ne voyaient pas l'intérêt spirituel de l'enseignement de Sri Aurobindo et de Mère. Ramana Maharishi ne comprenait pas l'idée d'évolution de la conscience et pourtant de nombreux disciples de Sri Aurobindo et Mère l'ont rencontré sur les conseils de ces derniers. Une spiritualité intégrale ne peut nier la spiritualité quelle qu'elle soit même si elle a une part d'ignorance qu'elle ignore.

Sri Aurobindo et Mère fonctionnaient un peu comme Arnaud Desjardins :
- peu de publicité pour leur ashram y compris dans leurs livres ;
- un accueil sans condition de ressource de toute demande après un échange de courriers, une première rencontre amicale qui leur permettent de jauger les chances d'intégration à la vie de l'ashram.

Où sont aujourd'hui les maîtres spirituels de l'évolution de la conscience contemporains (Arnaud Desjardins étant plus proche de Ramana Maharishi que de l'évolution consciente de la conscience) capables d'accueillir autour d'eux des apprentis disciples en jaugeant la qualité de leur aspiration spirituelle sur des critères qui ne soient pas en premier lieu leur capacité quantitative à s'affranchir de leurs tarifs ?

Peut-on faire confiance à une entreprise qui veut développer économiquement son pouvoir sur la culture environnante pour vraiment nous mener individuellement et non selon des recettes indifférenciées à entendre le gourou intérieur, le principe d'invidualisation cosmique de la vie qui est le vecteur de l'évolution consciente de la conscience ?

Si l'évolution consciente de la conscience est notre but alors même une monnaie de substitution sera à surmonter. C'est l'argent qu'il nous faut détruire. Le quantitatif va à l'encontre du qualitatif et donc d'une réelle individualisation évolutive de la conscience une.
Raoul Vaneigem un situationniste, ce mouvement qui avait inspiré le coeur rageur de mai 68 montre que nous avons besoin de rompre l'idée que nous devons gagner de l'argent pour vivre. Cette idée est le signe que notre bestialité reste prédominante. Reste à vaincre cela politiquement et spirituellement.
Spirituellement, il me semble que la position de st Paul sur la question de l'argent doit rester à l'honneur : il ne demande rien pour sa Bonne Nouvelle, il assure par son travail sa propre subsistance. Mais st Paul demande de l'argent pour son église... C'est là où la spiritualité se fait politique. La politique de l'Eglise a fait bon ménage avec les puissances de l'argent...

Politiquement si nous voulons abattre la religion de l'argent, il faut agir globalement et non seulement localement avec une petite monnaie entre soi. L'Etat doit être réinvesti : l'argent de l'Etat acquis par l'impôt ne doit plus servir à n'importe quoi, il doit servir à rendre libre les êtres humains de toute exigence matérielle de survie. Un Revenu Minimum d'Existence serait peut-être une solution. Plus de bourse d'étude, plus de retraite, plus d'assurance chomage, plus de droit opposable au logement, plus d'aides aux grosses multinationales pour des emplois précaires, plus d'aides aux industries d'armement et du pétrole, plus de justification pour les plus pauvres de s'embaucher dans la mafia et de croire en la loi de la jungle, un seul Revenu Minimum d'Existence permettant à chacun de ne plus avoir à travailler pour survivre c'est-à-dire de quoi manger, boire, s'habiller et se loger. Il va sans dire qu'aucune banque, rien ni personne ne pourrait prélever autre chose sur ce revenu que ce qui assure l'existence matérielle...

Dans un tel contexte, rapidement ceux qui pratiquent une authentique évolution consciente de la conscience pourraient mettre en place une économie libérée du profit et l'argent disparaîtrait peu à peu naturellement bien que devenu l'instrument docile de l'évolution de la consience. En effet il deviendrait inutile pour des êtres sensibles à la qualité de conscience et non à une certaine quantité de monnaie.

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