mercredi 12 octobre 2011

VIOLENCE ÉDUCATIVE ET EVOLUTION : VERS UNE EDUCATION AU-DELÀ DE LA FESSÉE ET AUTRES CHÂTIMENTS.

               Cliquez sur l'image pour la voir en détail.

Regardons un peu en arrière à quel point la violence est présente dans l'histoire de l'humanité. Nous commençons tout juste à envisager un horizon social et politique où nous pourrions nous en défaire, où nous devons nous en défaire si nous voulons que l'homme poursuive son évolution consciente de la conscience. En effet nous devons nous en défaire car les moyens de destructions sont devenus massifs et si nous laissons libre à cours à la violence ils seront fatalement utilisés.


Autre urgence de lutter contre la violence et de la déraciner là où elle s'inculque dès l'enfance : l'intolérance... Que l'on prête attention au fait qu'en imposant des règles et des croyances aux enfants en s'appuyant sur la violence, on interdit tout sens critique.

En tant que professeur de philosophie au lycée, je constate que tous les communautarismes (musulmans, évangéliques, front national, etc. c'est-à-dire les niveaux 1 à 4 de la spirale évolutive des valeurs), qui enferment les lycéens dans un monde intérieur étriqué, se sont bâtis d'une façon ou l'autre en se fondant sur la violence éducative familiale. Ces lycéens qui se refusent au sens critique justifient toujours la violence éducative contre les enfants qu'ils ont pourtant eux-mêmes subies. Ils sont tellement construits sur la peur qu'ils n'oseront pas mettre en cause l'éducation qu'ils ont reçue et pour exister ils sont prêts à imposer leur modèle et se désintéressent souvent du discours du professeur qui pourrait l'interroger.  
Interdire la violence éducative et surtout apprendre aux parents à dépasser l'usage de la violence contre les enfants sous n'importe quelle forme est surement en rapport avec la lutte contre la remontée politique et sociale des dogmatismes communautaristes (musulmans, évangéliques, front national, etc. c'est-à-dire les niveaux 1 à 4 de la spirale évolutive des valeurs) intolérants. 


Éduquer sans violence, sans dressage oblige forcément à faire grandir la conscience de l'enfant. Il s'agit alors quand nous devons le corriger dans sa conduite de défendre sa propre autorité intérieure contre les influences inauthentiques du monde, contre la confusion des aspirations authentiques de l'âme avec le monde des désirs de l'ego. Éduquer sans violence ne paraît donc possible que si soi-même éducateur parvenons à briser en nous toute forteresse mentale ainsi que toute soumission inconsciente à des forces de conscience bestiales pour vraiment et sincèrement servir la maturation de notre âme, le principe absolu de notre individualisation.


Voici quelques documents qui donnent à réfléchir :

Ces fessées qui rendent les enfants agressifs.

Les fessées données fréquemment rendraient les enfants plus  agressifs dès l'âge de 5 ans. Le "coin" est recommandé par les  spécialistes.
                                                                                                   Photononstop/AFP

Les fessées données fréquemment rendraient les enfants plus agressifs dès l'âge de 5 ans. Le "coin" est recommandé par les spécialistes.
Selon une étude américaine, les enfants recevant fréquemment la fessée auraient tendance à devenir agressifs en grandissant.
Les enfants qui reçoivent fréquemment une fessée à trois ans ont toutes les chances de devenir plus agressifs dès l'âge de cinq ans, affirme une étude américaine publiée lundi 12 avril 2010 dans le journal Pediatrics.
L'étude de l'Université Tulane a été réalisée auprès de 2500 mères. Près de la moitié (45,6%) affirmaient ne pas avoir corrigé leur enfant d'une fessée au cours du mois précédent, 27,9% l'avaient fait une ou deux fois et plus d'un quart, 26,5%, l'avaient fait plus de deux fois.
Par rapport aux enfants qui n'étaient pas frappés, ceux qui subissaient régulièrement un tel châtiment ont montré des signes agressifs dans leur comportement à l'âge de cinq ans, faisant preuve "d'insolence, de cris, de cruauté, de méchanceté vis-à-vis des autres".
Certains se battent, exercent des menaces, voire détruisent des choses, a affirmé Catherine Taylor, chercheur en santé publique à l'Université de Tulane (Louisiane, sud).
Malgré les recommandations de l'Académie américaine de pédiatrie contre la fessée, la plupart des parents aux Etats-Unis approuvent ou ont utilisé le châtiment corporel comme un outil de discipline. "L'étude suggère que même des formes mineures de châtiment corporel accroissent les risques d'un comportement agressif de l'enfant", ajoute l'enquête.
"Il y a des façons de discipliner les enfants de manière efficace sans avoir à les frapper et cela peut même réduire leurs chances d'être agressifs plus tard", explique Catherine Taylor."Les parents n'ont pas à avoir recours à la fessée pour obtenir ce qu'ils veulent. S'ils évitent la fessée mais utilisent des moyens non physiques, leur enfant aura de meilleures chances de bien se comporter plus tard", ajoute-t-elle.
L'American Academy of Pediatrics recommande le "coin" comme punition, un procédé qui donne à l'enfant le temps de réfléchir à son comportement et aux conséquences de ses actes.


Voici en complément une lettre de Olivier Maurel adressée à Claude Halmos dont l'ironie mordante dit bien les limites d'une pratique de la violence contre les enfants :


Madame,

Je suis un peu étonné de voir une grande spécialiste de l'enfance,  de la famille et de la relation telle que vous, faire l'apologie de la fessée.
Si je vous ai bien comprise, il ressort en effet de votre interview que la fessée est le meilleur moyen :
- de "montrer qu'on a des limites" et de "mettre des barrières" à 
l'enfant ;
- de faire appréhender à l'enfant ce qu'est un autre être humain ;
- de montrer que l'on doit respecter l'être humain ;
- de le "tirer du côté de l'humain" ; 
- de favoriser la construction de l'enfant. 

J'avoue que je n'aurais pas pensé que donner des coups à un être beaucoup plus faible que soi et lui enseigner que le principe le plus basique de la morale : "Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux  pas qu'on te fasse" est une baliverne, pouvait avoir tant de résultats positifs pour "l'être humain" !
J'aurais plutôt cru que déculotter un enfant et le frapper sur les fesses revenait à franchir les limites de son intimité et risquait de lui faire perdre sa capacité naturelle de réaction contre quiconque toucherait cette partie de son corps dans un autre but que celui de  le "tirer du côté de l'humain" ! Mais je dois me tromper.
J'aurais plutôt cru que pour apprendre à un enfant ce qu'est un autre être humain, il fallait se conduire avec lui avec affection et respect et qu'il existe d'autres moyens d'être ferme que de cogner  sur ses fesses. Mais je dois me tromper.
J'aurais plutôt cru que le rôle d'une spécialiste de la relation est d'aider les parents à trouver d'autres moyens que les torgnoles (parce que quand les fessées sont recommandées, pourquoi pas les torgnoles ?) pour éduquer leurs enfants. Là encore, je dois me tromper.
J'aurais plutôt cru que pour apprendre aux enfants à "respecter l'être humain", il fallait commencer par les respecter eux-mêmes. Nouvelle erreur !
J'aurais plutôt cru que pour "favoriser la construction de l'enfant", il y avait mieux que cogner sur lui. Quelle naïveté !
J'aurais plutôt cru que dans un pays où beaucoup d'enfants meurent encore de maltraitance, il valait mieux éviter d'encourager les parents à recourir à la violence. Autre naïveté !
J'aurais plutôt cru que dans un monde où, dans beaucoup de pays, le moyen d'éducation normal est encore la bastonnade, et où la plupart des parents trouvent, comme vous le pensez vous-même, que frapper un enfant est un moyen indispensable pour l'éduquer, il valait mieux soutenir les efforts du Comité des droits de l'enfant, de toutes les institutions internationales et du Conseil de l'Europe pour interdire cette méthode d'éducation que vous jugez si humanisante. Mais c'est sûrement vous qui, avec votre savoir psychanalytique, avez raison !
Et comme je trouve que mon épouse franchit parfois certaines limites et ne respecte pas toujours suffisamment "l'être humain" que je suis, je pense que je vais me convertir à l'excellent moyen d'éducation que vous préconisez. Quand tous les maris et les conjoints auront, comme moi, adopté cette méthode, je pense que nous aurons grandement contribué à tirer les femmes "du côté de l'humain".

Merci, chère Madame, pour vos excellents conseils.

Olivier Maurel
Porte-parole de l'Observatoire de la violence éducative ordinaire (OVEO)



Site : http://www.oveo.org/
Enfin pour aller plus loin, lisons Satprem dans la Genèse du Surhomme. Il va largement au-delà du problème de la violence éducative en nous fixant un idéal positif :

«Aussi bien, l’apprenti surhomme pourra-t-il commencer sa bataille très tôt, non seulement en lui-même mais dans ses enfants, et non seulement à la naissance de l’enfant mais dès sa conception. [...]
L’enfant de cette Cité naîtra avec une flamme, il naîtra consciemment, volontairement, sans avoir à défaire des millénaires d’animalité ou des abîmes de préjugés ; on ne lui dira pas à chaque instant qu’il doit gagner sa vie, parce que personne ne gagnera sa vie dans la Cité de l’Avenir, personne n’aura d’argent : on la vivra au service de la Vérité, chacun selon ses capacités et son art, et on n’y gagnera que de la joie ; on ne lui répétera pas sur tous les tons qu’il faut ou ne faut pas : on lui montrera seulement la tristesse instantanée de ne pas écouter la petite note juste ; on ne le harcèlera pas avec l’idée du métier à découvrir, de la réussite à faire, de la victoire sur autrui, du premier de classe et du dernier de classe, parce que personne ne réussit ni n’échoue dans la Cité de l’Avenir, personne ne fait un métier, personne ne triomphe des autres : on fait le seul métier d’une petite note claire qui éclaircit tout, fait tout pour nous, dirige tout pour nous, réunit tout dans son harmonie tranquille, et réussit la seule réussite d’être en accord avec soi-même et avec tout ; on ne lui apprendra pas à dépendre d’un maître, dépendre d’un livre, dépendre d’une machine, mais à se fier à cette petite flamme dedans, cette petite coulée joyeuse qui guide les pas, amène la découverte, fait trébucher par hasard sur l’expérience et vous livre la connaissance comme en se jouant, et il apprendra à cultiver les pouvoirs de son corps comme d’autres aujourd’hui cultivent le pouvoir des boutons de machine ; on n’enfermera pas ses facultés dans un moule de vision et de compréhension tout fait : on encouragera sa vision qui n’est pas des yeux, sa compréhension qui n’est pas des livres, ses rêves des autres mondes qui préparent celui de demain, ses communications directes et ses intuitions immédiates, ses sens subtils ; et si l’on se sert encore de machines dans la Cité de l’Avenir, on lui dira que ce sont des béquilles provisoires en attendant de trouver dans notre propre cœur la source du Pouvoir pur qui transmuera un jour cette matière comme nous transmuons la feuille blanche, d’un coup de crayon, en une jolie prairie. On lui apprendra le Regard, le vrai regard qui peut, le regard qui crée, le regard qui change tout - on lui apprendra à pouvoir par lui-même et à croire en son propre pouvoir de vérité, et que plus on est pur et clair, en harmonie avec la Loi, plus la matière obéit à la Vérité. Et au lieu d’entrer dans une prison, l’enfant entrera dans un monde ouvert où tout est possible -et où tout est effectivement possible, car il n’est d’impossibilité que celle que nous croyons. Et finalement, l’enfant grandira dans une atmosphère d’unité naturelle où il n’y aura pas de "toi", "moi", il "tien", "mien", où on ne lui aura pas appris à chaque instant à mettre des écrans et des barrières mentales, mais à être consciemment ce qu’il est inconsciemment depuis toujours : à se prolonger dans tout ce qui est, dans tout ce qui vit, à sentir dans tout ce qui sent, comprendre par une même respiration profonde, par un silence qui porte tout, à reconnaître partout la même petite flamme, à aimer partout la même petite coulée claire, et à être moi partout sous un millier de visages et dans un millier de musiques qui sont une seule musique. »

1 commentaire:

Serge Durand a dit…

N.B:

Satprem dans Néanderthal regarde voit parfaitement le danger des communautarismes qu'il soit d'extrême droite ou religieux. Il est important d'en être conscient pour s'y confronter. Les pionniers de l'évolution de la conscience savent que leur avancée dépend aussi de celle de ceux qui sont dans l'humanité en queue de peloton.

Nous devons nous appuyer sur les chemins qui ont déjà été forgés pour favoriser l'avancée des plus attardés.

Au delà des communautarismes religieux prémodernes, il existe bien sûr un islam et des formes d’Évangélisme modernes (cf. Eric Geoffroy, Mohammed Arkoun, etc. du côté musulman ou les unitariens du côté évangéliques). Mais à vrai dire la modernité ne libère pas encore tout à fait du prosélytisme et donc de l'horreur qu'est une forteresse mentale.

Pour envisager d'aller plus loin , nous devons nous appuyer sur les quelques rares pratiquants d'un islam et d'un évangélisme postmoderne (Abdennour Bidar par exemple du côté musulman ou Michael Bernard Beckwith du côté évangélique). Ces formes d'islam ou d'évangélisme qui sont libérées de toute intolérance sont encore largement inconnues dans nos banlieues. N'est-ce pas une stratégie non violente possible pour lutter contre le communautarisme que de favoriser socialement voire politiquement un tel chemin évolutif ?

Ne pourrions-nous pas agir au niveau de la formation des Imams ? L'initiation à la laïcité qu'on veut leur proposer serait moins artificielle si on les initiait à ces pensées religieuses modernes et postmodernes. Ne pourrions-nous pas agir de même sur la pauvreté spirituelle des prêcheurs évangéliques de nos banlieues ? Pourquoi les courants chrétiens protestants ou catholiques sont-ils moins mobilisateurs que ces derniers : serait-ce parce que eux qui courraient encore derrière la modernité sont confrontés à l'hémorragie de leurs fidèles qui passent à la postmodernité ? Cette crise les rend-elle inapte à reconquérir le besoin de religion des banlieues ?

Derrière l'identité spécifique de ces communautarismes, il s'agit de se confronter aux types de mentalités des protagonistes et qui menacent la cohésion nationale y compris par excès de nationalisme soi-disant anticommunautariste.

Du côté de la République, nos programmes scolaires prennent-ils en compte ces réalités ? Ne faudrait-il pas insister réellement en Sciences de la Vie et de la Terre sur l'évolution des espèces que ces courants rejettent ? En Histoire ne devrions nous pas insister sur la légitimité de l'athéisme et de la laïcité ? En philosophie ne devrions-nous pas montrer la fécondité du dialogue interreligieux ou du moins montrer une ouverture à des pensées philosophiques et religieuses donnant accès à des mentalités plus éclairées, plus spiritualisées, etc.

Enfin nos programmes éducatifs sont-ils assez portés sur l'apprentissage de l'intelligence émotionnelle qui permet de questionner l'agressivité inhérente à ces communautarismes religieux qui abusent le plus souvent de la violence éducative ?

A vrai dire notre République faute de distinguer officiellement qu'elle a affaire à des mentalités prémodernes, modernes et postmodernes se rend impuissante. Elle entend appliquer uniformément des programmes à tous ses enfants au nom de l'égalité. Elle s'interdit alors d'envisager une adaptation de ses programmes éducatifs suivant l'évolution des mentalités à favoriser. Elle s'interdit de briser le communautarisme des classes en éparpillant par exemple les élèves d'une zone géographique donnée grâce à des systèmes de transports ou d'internat.

Dès lors elle ne parvient pas à reconquérir sa légitimité auprès de ces populations en réalisant sa promesse d'égalité des chances du point de vue social.